Le témoignage de la Présidente...

   Le Groupe d’Entraide Mutuelle GEM, L’ABEILLE VIE, a été lancé par le GEM OXYGEM de VILLEFONTAINE en décembre 2014, suite à une demande de l’ARS. L’idée étant qu’OXYGEM devait initier la création d’un GEM sur BOURGOIN-JALLIEU, ville où un besoin se faisait sentir.  

   Au début, le GEM de BOURGOIN-JALLIEU se situait dans un appartement du centre-ville, c'était une antenne d’OXYGEM. Il est devenu L’ABEILLE VIE avec ses 18 membres fondateurs, le 2 octobre 2015.

Petite anecdote : je suis la toute première adhérente à avoir poussé la porte de l’OXYGEM de BOURGOIN-JALLIEU. Aujourd’hui, nous sommes environ 35, avec 8 administrateurs dont 6 au bureau.

   Durant la phase de diagnostic du PTSM (Projet Territorial de Santé Mentale), nous avons été consultés et avons commencé à nous intéresser au projet. Avec les confinements et la baisse d'activité liés à la COVID, nous nous sommes un peu détournés du PTSM pour nous recentrer sur l’accueil des adhérents. Mais depuis, c’est avec plaisir que nous avons participé à la CSSM (Commission Spécialisée en Santé Mentale). Même si notre GEM garde ses activités favorites, j’essaye de temps en temps de proposer des sorties plus «citoyennes» à mes administrateurs. C’est intéressant de parler de santé mentale, c’est important de donner son point de vue et c’est valorisant d'être écouté !

Nos projets favoris sont la pair-aidance et les GEM itinérants. Nous avions très envie de créer un GEM itinérant, mais nous avons dû y renoncer, comme vous allez le comprendre.

   Depuis peu, nous avons décidé de ne plus embaucher de salarié. En effet, à la suite du départ de notre employée, nos administrateurs se sont mobilisés et le GEM s'est découvert capable d'autonomie. Cet élan très positif ne devait pas se perdre, c’est pourquoi aujourd'hui, nous préférons faire appel à des prestataires privés pour nous soulager.

Ce changement de fonctionnement repose sur l’initiative des administrateurs. Cela a nécessité une complète réorganisation, c’est pourquoi nous nous sommes désengagés du GEM itinérant.

Nous sommes un GEM très créatif, nos adhérents peuvent se lancer dans tous les projets qu’ils souhaitent. Le GEM L’ABEILLE VIE fournit tout de matériel possible !

Lorsque nous créons, ce n’est pas une simple activité occupationnelle ! Nous sommes fiers de nos créations, de l’évolution de nos compétences, de faire plaisir, d’offrir, et de ne pas fumer 30 cigarettes ou boire 10 cafés par jour….

Les activités artistiques sont vectrices de rétablissement, j’en suis convaincue !

D’ailleurs, nous avons à coeur de participer à des marchés de Noël pour exposer nos créations et mettre en valeur notre savoir-faire.

  Nous poursuivons un grand projet de jardin potager en mémoire de mon compagnon, Patrice MEGARUS, ancien trésorier, décédé l’année dernière. Patrice avait déjà commencé à nous faire un beau jardin mais sans lui, nous sommes perdus. J'ai monté un dossier de demande de subvention auprès de la Fondation Caisse d’Epargne pour financer les gros travaux de notre potager. Lorsque ce projet arrivera à son terme, nous imaginons faire une grande fête autour de notre jardin en brandissant notre pancarte : «Le jardin de Patrice, en hommage au roi des bourdons ». 

 Mon parcours ? J’ai été hospitalisée très jeune à la clinique de Chanay puis Georges Dumas (Nouvellement Grésivaudan). J’y ai bénéficié de soins de qualité, mais surtout j’ai réussi à passer mon bac et à envisager des poursuites d’étude. Après beaucoup de difficultés, j’ai validé un BAC +2 d’Informatique au Conservatoire National des Arts et Métiers. Fière de moi, j’ai continué mes études et j'ai essayé de rentrer dans la vie active, sans savoir ce qui m’attendait.…

 J’ai rapidement trouvé du travail auprès d’un entrepreneur très sympathique : j’ai tenu une demi-journée ! Une demi-journée après plusieurs années pour comprendre la phrase du docteur Caron qui m’agaçait tant « Mais à quel prix ? ». J’ai donc tout arrêté pour devenir bénévole dans des associations et c’est là que j’ai rencontré le GEM de BOURGOIN-JALLIEU.

 Le GEM, c’est plus qu’un travail à temps plein, ce sont des mails à 1h00 du matin, des appels aux heures des repas, les week-ends au jardin, les vacances à mettre à jour le site Internet et à déposer les dossiers de subventions, pour pouvoir réaliser des activités (sorties, vacances, esthétique, sport, loisirs créatifs (modelage, récupération, déco, déco de Noël, carterie, gravure, collage, peinture à la bombe, perles, portraits diamantés, bijoux, mosaïques), arts (peinture, dessin, pastels, fusain, poterie), bricolage, bois, jardinage, repas, goûters...). Mais c'est surtout, se rassurer et rassurer autrui, s’entraider, s’autonomiser, prendre soin de soi et des autres pour prendre et donner confiance, pour apprendre encore et toujours, s'accorder de l’importance, être considéré, se sentir utile, donner du sens là où il n’y en avait plus du tout.

  Toutes ces valeurs, avant L’ABEILLE VIE, je n’y croyais plus, l’utopie n’existe pas mais le GEM existe ! Je n’ai jamais été aussi bien entourée de toute ma vie, tout le monde fait attention à tout le monde et une personne néfaste pour le groupe n’a pas sa place. Toutes les personnes qui viennent à L’ABEILLE VIE veulent juste se faire du bien. Pour se faire du bien, nous pratiquons les activités que nous voulons et à notre rythme SANS PRESSION.

Parfois, nous créons en groupe. En arrivant dans notre maison, nous avons aménagé un grand atelier bois dans le garage où nous avons rapidement confectionné notre premier arbre aux idées reçues.

Nous nous sommes inspirés des textes du Psycom (site d'information sur la santé mentale) pour écrire sur deux faces d’une pomme en bois : sur un côté, marquée en rouge, une idée reçue (mythe) sur la maladie psychique et sur la seconde face, en vert, la réponse au préjugé (réalité). 

Ces pommes sont suspendues sur un arbre en bois de 2m 40 de haut. Nous nous en servons pour aller à la rencontre du public et déstigmatiser le handicap psychique. Nous avons même créé de plus petits arbres, à poser sur une table, ils servent à écrire des témoignages.

Contrairement à une entreprise, nous n’avons pas de contrainte et c’est ce qui nous permet d’être productifs.

Beaucoup de personnes qui me connaissent me disent que je pourrais devenir la salariée du GEM, mais je ne veux surtout pas ! Je préfère travailler pour le GEM sans contrainte plutôt que d’avoir un salaire avec ses astreintes (laissez-moi envoyer les mails à 1h00 du matin !)

Je fais également beaucoup de créations que j’expose, de même que d’autres adhérents. Parmi mes activités de prédilection, il y a le travail du bois. Mes amis me disent que je fais un bon travail qui mériterait d’être professionnalisé.

Si je dois me dépêcher pour exécuter une tâche parce que je suis pressée, alors, souvent je me blesse. De plus, dès que je me sens trop inattentive, je suis obligée de faire une pause pour ne pas me blesser, voir même arrêter.

 Du coup, j’ai préféré le bénévolat aux doigts en moins ! Lorsque j’étais plus jeune, je me sentais vide. En me reconstruisant, je me suis remplie d’amour pour les autres. Aujourd’hui, je suis fière de dire que j’aime mon GEM, j’aime mes adhérents et ils me le rendent bien. Malgré le décès de mon compagnon, je me sens très entourée, pourtant, avant son départ, j’étais très épanouie et heureuse. Je me rappelle d’une conférence des SISM (Semaines d'Information sur la Santé Mentale) où j’expliquais que même avec un diagnostic de schizophrénie et une incapacité à travailler, j’avais trouvé le bonheur…. 

Ça paraît fou mais c’est possible ! 

Votre considération participe à notre bonheur et ne nous laisse pas indifférents. Sans la collaboration de toutes les personnes que nous rencontrons, nous serions bien mis à mal et nous ne pourrions pas exister. 

Un grand merci à tous !

Merci également pour l’intérêt que vous aurez eu à lire ce témoignage jusqu’au bout.

Arielle SANIEL, Présidente du GEM L’ABEILLE VIE